Martigné-Briand
Carême 2024
« Nous exhortons tous les frères à vivre en toute pureté pendant le carême, et à effacer, en ces jours sacrés, toutes les négligences des autres temps. »
Règle de Saint Benoît 49,2-3
« Rien n’est perdu »
… rien de ce que je perds n’est perdu, pas même mes négligences, si j’ai/si nous avons ce désir au cœur de créer notre propre demeure éternelle et celle de l’humanité toute entière. Rien n’est perdu si nous avons l’espérance de cieux nouveaux et d’une terre nouvelle.
« Pas un cheveu de votre tête ne se perdra, c’est par votre constance que vous sauverez vos vies ! » Lc 21,18
Posons-nous un instant, arrêtons-nous ici, maintenant, un court instant. Prenons ce laps de temps, de recul pour nous poser la question : « Vers où voulons-nous aller ? Vers quoi, vers qui ? Pour quoi, pour qui ? »
Chacun(e) de nous a sa propre réponse qui lui est intimement personnelle. Une réponse qui lui donne vie. Dans ce court chapitre sur le carême, Saint Benoît nous exhorte à la vie, avec joie :
« La vie d’un moine devrait être de vivre en toute pureté dans la joie de l’Esprit Saint (…) en attendant la Sainte Pâque avec la joie du désir spirituel » RB 49
Pour cela, Saint Benoît nous invite à effacer les négligences des autres temps… non pas, effacer pour gommer, mais, en latin, effacer pour « laver » … laver avec les larmes de notre prière, avec notre assiduité à la lecture, avec la componction du cœur, avec nos petits actes de miséricorde…
Est négligent celui qui ne s’applique pas à ce qu’il devrait faire, celui qui laisse les choses pour plus tard… « A quoi bon ? … » dirait-il.
En latin « neligere » est le contraire de « religere » d’où vient le mot « religion » qui signifie « relier les choses », « mettre en lien le monde des hommes avec le monde de Dieu », « mettre du lien entre les hommes », « assembler, relier » …
Celui qui n’a pas de religion n’est pas un athée, mais un négligent…
Mais rien de tout cela n’est perdu, si nous avons le désir de « sauver notre vie » !
« Sauver sa vie », c’est d’abord vivre avec toutes les composantes de notre incarnation :
Habiter notre corps, notre chair
Habiter la Terre
Habiter le temps
Habiter notre monde
Habiter le royaume
Et enfin… Habiter la Gloire … avec Foi, Espérance et Charité,
… pour passer du Jardin d’Eden (en Genèse 1, premier livre de la Bible) à la Jérusalem Céleste (Apocalypse 21, dernier livre de la Bible) où tout sera relation-liens, où nous pourrons relier les choses, « religere », vivre en religieux et non plus en négligent.
Tout ce qui fait notre vie aujourd’hui peut servir à cette œuvre de co-création et participe déjà, ici et maintenant, à la construction du Royaume fait de pierres vivantes : avec nos joies, nos réussites, notre sueur, nos échecs, nos doutes, nos mesquineries, notre misère…
Il ne s’agira plus alors, de « sauver sa vie », mais bel et bien « d’être sauvé par la Vie donnée du Christ ». C’est le sens ultime de ce carême que nous commençons :
Se mettre à la suite du Christ,
mettre nos pas dans les siens,
en marchant résolument vers Jérusalem,
pour vivre avec Lui la Sainte Pâque,
pour passer de la mort à la vie,
avec la joie du désir spirituel de ceux qui croient que seul le Christ peut nous sauver.
Même en cette période de l’histoire plus qu’inquiétante pour la survie de notre planète Terre et de l’humanité, où guerres, catastrophes naturelles, perte de sens, fuite en avant, utilisation démesurée de la technique… peuvent nous faire douter de ce « monde inébranlable qui tient bon » dont nous parlent les Psaumes (Ps 95,10) …
Même en cette période où tout semble s’effondrer, s’écrouler…
… C’est au creux de cette page d’histoire, de ce qui fait notre temps, que la foi et l’espérance d’une terre nouvelle et de cieux nouveaux sont essentiels.
Mais l’espérance chrétienne, celle d’une terre nouvelle et de cieux nouveaux, celle du Royaume de Dieu, celle de la Vie éternelle, n’est pas celle d’un monde meilleur construit grâce à un humanisme bienveillant, aux droits de l’homme, aux progrès techniques, à la démocratie, même si tout cela compte… Non, l’espérance chrétienne, elle, passe par la Croix.
Elle est la vertu des pauvres et des humbles qui s’appuient sur la confiance en Dieu. Ce qui rend la vie meilleure n’est pas en premier lieu le changement des circonstances (un meilleur niveau de vie…) mais la conversion de notre cœur qui reconnaît que Jésus est présent, qu’il marche avec nous, qu’il nous parle, nous pardonne et nous aide à pardonner et à aimer les autres.
Ce positionnement avec le Christ, par une vie toute en Dieu, au cœur même de ce qui fait nos vies ici et maintenant, en 2024, peut tout changer, peut changer le regard que nous portons sur le monde et la part que nous avons à y prendre.
« Si quelqu’un est dans le Christ, c’est une création nouvelle : l’être ancien a disparu, un être nouveau est là. » 2 Co 5,17
« Croissez dans la grâce et la connaissance de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ : à lui la gloire maintenant et jusqu’au jour de l’éternité ! Repentez-vous et convertissez-vous. Le Seigneur enverra le Christ qui vous a été destiné, Jésus, Celui que le ciel doit garder jusqu’aux temps de la restauration universelle dont Dieu a parlé par la bouche des saints prophètes. » Ac 3,18-21
Le Royaume inébranlable n’est pas pour demain, il est pour aujourd’hui, nous pouvons croire que nous y sommes invitées comme les invités au festin de la parabole, en Matthieu 22.
« Il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus » Mt 22,14
Soyons de ceux et celles qui adhèrent et consentent à cette vie en Dieu, de Dieu, en servant la vie de notre prochain, dans la vérité de ce que nous sommes, en nous revêtant de l’habit de noce, celui de la Parole de Dieu.
« Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas » Mt 24,35
Que ce carême soit temps de consentement à la Vie, d’obéissance à la vie, aux évènements, d’éveil à la vie, de service de la vie, d’accomplissement de la vie… … la vie en Dieu,
… la vie pour nos frères et sœurs en humanité.
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